Au détour du sentier pentu, une trouée dans le feuillage révèle un paysage saisissant. Côté terre: des collines verdoyantes recouvertes d’une épaisse forêt vierge ondulant jusqu’à l’infini. Côté mer: les reflets dorés de la longue plage de sable, l’écume blanchâtre de la barrière de récifs au large, les pirogues immobiles dans le lagon vert.
La péninsule de Masoala sur la côte est de Madagascar: un immense massif de forêt tropicale sauvage grand comme le Valais qui s’avance dans l’océan Indien. Un morceau de nature intacte qui rappelle un passé pas si lointain lorsque la Grande Ile, au large de l’Afrique, était encore entièrement couverte de forêts.
Un coin de paradis originel qui n’a plus à craindre pour son futur. Depuis une année, Masoala est devenue le plus grand parc national de Madagascar. 210 000 hectares (la surface du canton de Zoug) de jungle humide, de mangroves, de marais sont désormais officiellement protégés. Cela suffira-t-il à les préserver de la déforestation galopante que connaît Madagascar?
Rappelons que 210 000 hectares, c’est aussi la surface de forêt qui est brûlée chaque année dans l’île par des paysans affamés. Pour nourrir leur famille, ils n’ont pas d’autre choix que d’abattre des arbres centenaires, brûler des parcelles entières de forêt pour y cultiver du riz et du manioc.
D’après les calculs des experts de la Banque mondiale, Madagascar court le risque de perdre la totalité de ses forêts tropicales d’ici l’an 2020 si la déforestation devait se poursuivre au rythme actuel.
Une visite à Masoala s’impose donc en urgence. Histoire de se rendre compte d’abord de l’incroyable richesse biologique que représente cette forêt où il pleut plus de deux mètres par an.
Première destination: Nosy Mangabe, une minuscule île verdoyante située dans la baie d’Antongil, à l’ouest de la péninsule. Cette réserve naturelle est le paradis des botanistes et des naturalistes. Personne n’y habite, la nature y est reine. La seule habitation consiste en un modeste laboratoire de terrain destiné aux scientifiques.
C’est sur cette île que fut (re)découvert, dans les années 50, un animal sorti tout droit de la préhistoire: le aye-aye, un minuscule lémurien nocturne à l’allure étrange; des oreilles de chauve-souris, des dents de lapin et des mains de singe dotées d’un troisième très long doigt dont il se sert pour creuser les écorces et prélever des larves d’insectes.
A peine moins difficile à découvrir que le aye-aye, l’uroplatus fimbriatus est une autre grande attraction de l’île. Ce gecko nocturne de vingt centimètres est le champion du mimétisme. Son corps aplati se confond à la perfection avec l’écorce recouverte de mousse et de lichen sur laquelle il dort la journée.
Enfin, Nosy Mangabe abrite également des centaines d’espèces de grenouilles différentes: des grandes, des petites, des vertes, jaunes, multicolores, tachetées, etc. Clin d’œil également au brookesia peyrerasis, un des plus petits caméléons du monde, dont la taille ne dépasse pas une demi-allumette.