L’Alaska et ses ours
L’Alaska, mieux que toute autre région du globe, donne l’occasion de faire la connaissance de l’ours brun, puisqu’une population estimée à près de 40 000 individus y vit en liberté
Tous ceux qui aiment les grands espaces, qui recherchent le calme bienfaisant de la nature et aspirent à oublier le temps de quelques semaines nos régions surpeuplées et agitées devraient essayer l’Alaska. Ils y trouveront non seulement une faune encore préservée, mais aussi des paysages à couper le souffle.
Forêts immenses et toundras, sillonnées d’innombrables cours d’eau s’étirant en méandres sinueux jusqu’à la mer, montagnes et glaciers, volcans encore actifs et côtes sauvages concourent à combler le randonneur, photographe, peintre, pêcheur ou chasseur.
Et dans cette nature, le voyageur rencontrera aussi des descendants des premiers hommes venus s’y établir. Indiens, Aléoutes ou Inuits-Eskimos, il convient de les aborder avec respect. Un salut, quelques questions suffisent à établir un contact amical, à permettre l’une ou l’autre photo inoubliable, à trouver conseil pour un emplacement où monter sa tente. Disponibilité et générosité s’écrivent ici en majuscules, au sein d’une population soumise aux règles sévères d’un milieu rude et exigeant.
L’ours dans son royaume
C’est là aussi le royaume de l’ours brun (ursus arctos), le plus grand des prédateurs terrestres. Dans les contrées côtières, notamment sur l’île de Kodiak, il peut frôler la tonne, et mesurer plus de trois mètres quand il se dresse sur ses pattes postérieures. En comparaison, l’ours brun européen fait plutôt chétif, avec ses 150 kilos de poids maximal et une taille inférieure de moitié.
L’ours brun d’Alaska est appelé souvent et à tort grizzly, comme son cousin de l’intérieur des terres, plus petit mais de réputation féroce. En fait, il s’agit de deux variétés de la même espèce, aux mœurs similaires, que seul distingue vraiment l’habitat, îles et jusqu’à deux cents kilomètres de côtes pour l’ours brun, région centrale de l’Alaska pour le grizzly.
Classé au nombre des carnivores, l’ours brun, paradoxalement, a adopté une alimentation essentiellement végétarienne, faite de baies, de racines et tubercules, de graminées sauvages. Mais il ne dédaigne pas pour autant la viande, quand l’occasion se présente, notamment des rongeurs.
La passion du saumon
Mais la grande gourmandise de l’ours brun reste le poisson, en l’occurrence le saumon. C’est aux périodes de frai, de la fin du printemps au début de l’automne, quand les saumons remontent les cours d’eau pour déposer leurs œufs, qu’il fait sa «grande bouffe» annuelle et emmagasine une bonne partie des réserves de graisse dont il aura besoin pour hiberner durant le long hiver arctique.
Là, le plantigrade aux habitudes plutôt solitaires ne rechigne pas à retrouver des congénères sur les berges des fleuves pour de mémorables parties de pêche. Mais attention, pas n’importe comment, il y a des règles de préséance que le novice apprend vite à ses dépens. Les jeunes adultes encore inexpérimentés sont chassés sans douceur des meilleures places, que leurs aînés se réservent. La tâche est plus ardue encore pour une ourse accompagnée de sa progéniture, qu’elle doit continuer à surveiller et à protéger tout en pêchant pour elle et sa petite mais gloutonne famille.
Cependant, il s’agit d’observer l’ours brun de loin, de préférence: s’il est un caractère qu’il partage avec les autres grands prédateurs qui n’ont pas appris à craindre l’homme, c’est son côté parfaitement imprévisible.
Et il est d’autant plus dangereux que ses allures bonhommes ne laissent guère deviner qu’il peut sur l’instant se transformer en formidable machine à tuer. Dans deux cas de figure, le risque est d’ailleurs extrême: celui de la mère accompagnée de ses petits, et celui de l’ours dérangé alors qu’il s’occupe d’une proie ou veille à proximité.
Une prudence de tous les instants est de ce fait de mise dans les régions à ours. Une visite ne devrait ainsi jamais se faire en solitaire, et la présence d’un guide est absolument à conseiller. En tout état de cause, il importe de se documenter au préalable et de se conformer aux prescriptions données aux centres d’information des parcs.